RETOUR A LA PREMIERE PAGEDU CARNET

 

Le campement Njgabaar est très bien placé à proximité immédiate du village Diadem3 et à vingt minutes à pieds de l’entrée du Parc.
Il est géré bénévolement par Cheikh Diouneydi Gaye, son équipe de villageoises de Diadem3 étant bien sur rémunérée.




Cheikh est un homme d’une trentaine d’années, très cultivé, qui a déjà servi dans un dispensaire et été instituteur. Maure originaire de St Louis, il est imam de son village Peul, marié à la fille du chef et il occupe un rang élevé au sein de son village, et sa sagesse , jaugée sur chacun de ses gestes de chaque jour, lui a permis d’acquérir cette stature . Son village n’est pas Diadem3, ce ne serait pas gérable, il est a quelques kilomètres plus au Sud.
Cheikh a donc été choisi par le conservateur du Parc sciemment, pour faire le lien entre les villageois, le parc, les gens hébergés au campement, et s’occuper de la gestion de Njagabaar avec une équipe (cuisinière, serveuse, femmes de ménage) de villageois de Diadem3. L’éthique du campement Njagabaar est orientée évidemment vers la protection de l’environnement aussi bien par la sensibilisation des villageois que celle des visiteurs qui y séjournent.
Le statut de bénévole de Cheikh facilite sa tâche de médiateur car faire accepter les contraintes environnementales aux villageois n’est pas facile. Le drame suivant démontre la difficulté de la tâche dans les cas extrêmes.
Lorsque l’on arrive au Parc naturel du Djoudj la première chose qui étonne c’est que les éco-gardes des parcs nationaux sont en tenue paramilitaire et armés la plupart du temps au moins d’un grand couteau. Etonnant pour contrôler un parc naturel comme le Djoudj ou il n’y a plus d’animaux à fort intérêt économique susceptible d’attirer le braconnage.
Ces gardes sont, selon le principe d’éco-gestion, recrutés dans les villages concernés. Leur bonne connaissance de l’endroit est un atout en tant que guide de terrain.
Bien que bénéficiant de formations, leur expertise naturaliste n’est pas de niveau très élevé, il faut bien le dire.S’ils savent bien sûr nommer et reconnaitre les principales espèces,le niveau est assez inégal et seule leur curiosité naturelle motivent certains à se documenter pour affuter leurs connaissances. En ce qui concerne leur formation paramilitaire nous ne pouvons en juger.
Ceci n’enlève rien à l’extrême gentillesse, leur prévenance et la compagnie très agréable qu’ils dispensent.
Toujours est il qu’il y a deux ans, un jeune villageois d’un des villages de la zone tampon a pêchait dans la zone du parc. C’est strictement interdit évidemment. Malgré les sommations des éco-gardes l’ayant surpris, il a continué à pêcher. Devant son refus, les gardes l’ont finalement tué.
Abattre pour quelques poissons un gamin de 10 ans…..
Excès de zèle, incompétence, imbécilité , manque de formation militaire ? nous ne savons pas, Cheikh ne nous ayant confié cette histoire que difficilement. Toujours est-il que le drame atroce et absurde a évidemment touché très profondément tous les villages du Djoudj, de même que Cheikh lui-même et ses collègues. La réaction des villageois fut une hostilité importante à l’égard du Parc au point que les fondements de tout le système d’éco-gestion participative du Parc était en péril et qu’il fallait intervenir auprès des populations de chaque village pour ramener le calme .
Cheikh a pris son bâton de pèlerin, est intervenu de village en village, il a su, à force de dialogues, de valeurs spirituelles et de sagesse atténuer sinon la douleur du moins la révolte . En quatre jours le calme est revenu dans les villages du Djoudj et le temps faisant, la reprise des activités habituelles liées au Parc fut effective. Son statut de bénévole a probablement également joué en sa faveur
vis-à-vis de gens démunis de richesses matérielles.
Cheikh trouve dans cette activité un moyen de s’améliorer humainement, de défendre des valeurs
auxquelles il croit profondément, et d’essayer de les mettre en application au quotidien, aussi bien au niveau du respect de l’environnement que de celui des hommes. Il n’est pas rémunéré mais sa soif d’apprendre trouve dans les stages et formations dont il bénéfice un puit de connaissances auxquelles il ne pourrait avoir accès sans son activité.


 

 

 

 

Notre arrivée au campement Njagabaar de Diadiam3 se fait en pleine après midi, sous un soleil de plomb ; Jusque là jamais nous n’avions ressenti la morsure du soleil autant qu’en sortant du taxi.

 



Quelle température fait-il ? plus de 40°C, peut être 45°C nous répond le chauffeur. Il nous plante là en pleine fournaise, mais il faut encore que nous poussions la voiture qui s’enlise dans les sables.
Vite de l’ombre, il est impossible de rester au soleil !
L’accueil de Njagabaar est vide, et seul Cheikh est là. Il vient au campement le matin vers 5 heures du matin en vélo ou à pieds depuis son village, pour en repartir, lorsqu’il ne reste pas dormir, vers 23h.
Il nous accueille sans en faire trop, sans paroles ostentatoires, sans le débordement et les palabres habituels auxquels nous avaient habitué les Sérère du Saloum. Quel contraste avec le Saloum ! Ce qui nous va bien d’ailleurs, tant notre envie de nous poser après une bonne douche est grande.
Sans fioritures, mais toujours ouvert au dialogue en profondeur, Cheikh va à l’essentiel mais il est capable de parler des heures sur ses sujets favoris si on lui montre un intérêt.
Faut de quoi, si les visiteurs s’en tiennent au bonjour-bonsoir, il n’ira pas les chercher mais se contentera de faire son travail d’accueil et de bon gestionnaire du campement.
Tout en étant discret, il est extrêmement attentif au comportement de ses hôtes. Ne nous parlant pas si on l’on ne le sollicite pas, respectant nos rythmes.
Si on gagne sa confiance, si l’on est sur la même longueur que lui, que l’on partage certaines de ses valeurs, si l’on s’intéresse à son peuple, aux hommes, à la nature, alors jour après jour il ouvre les portes, se livre, et distille les secrets bien gardés de sa vie et de celle de son village.
Plus tard dans le séjour, il nous fera l’honneur de nous accueillir chez lui.
En tant que bretons, nous faisons le parallèle entre notre réserve celte et les maures d’un coté,
et les wolof avec leur chaleur immédiate et les méridionaux de l’autre.
Le comportement de Cheikh est le garant du bien être et de la douceur de vivre à Njagabaar malgré ou peut grâce la rusticité et la promiscuité de ce petit campement. Heures après heures, nous avons découvert une maison d’amis. Nous nous sentirons comme chez nous, les rapports simples et vrais et au milieu de gens sans fioritures, avec en toile de fond permanente ces valeurs premières que sont le respect de l’homme et de la nature. Sensation unique que de toucher une forme d'idéal dans l’art de vivre ensemble l’instant présent mais en toute liberté. Comme si les silences avaient la même valeur que les mots, tant que la corde qui vibre en chacun de nous sonne en symbiose avec celles des autres pour former un accord parfait qui résonne dans le réfectoire lorsque le dîner du soir nous réunit.

Le Soir de notre arrivée, nous baladant dans le village, nous ferons connaissance avec ses habitants,
Ses phacochères qui le traversent tranquillement pour prendre le bain du soir au marigot.

 



 



Ses enfants maures, beaux comme des anges, qui reviennent du même marigot, ou ils ont fait la vaisselle pour le repas du soir. Ils ne parlent pas un mot de français, mais leur rencontre impose un respect qu'il suffit d'accompagner dans la grâce de leurs activités journalières. La communication passe par le regard, la compréhension par le sourire, l'entente par la main que l'on prête. Ne nous méprenons pas, il ne s'agit pas de s'extasier, la vie est très dure ici, mais l'humanité, la sérénité, l'amitié immédiates qui se dégage de ces visages plus familiers que les visages fermés des travailleurs occidentaux ébranlent nos coeurs un peu refermés par sa nouveauté et son évidence.

 



 




 


 

 

 

 

Le marigot ou tout se fait, lavage de la vaisselle, du linge et toilette corporelle.

 





 



 



Les petites ramasseuses de bois fr Fiadiam3 , pour le feu servant à cuire principalement le riz et le poisson qui l'accompagne et évidemment le thé.

 





 

Les femmes coupents les roseaux pour en faire des paniers
les hommes vont donc chercher l’eau potable en charette à un puit d’eau potable lorsque , en saison sèche, le réservoir principal est vide. Comme dans le Saloum.

 



C’est là que nous allons vivre au contact des gens, nous étions venu visiter le miracle de la nature , elle ne nous décevra pas, mais là ou nous pensions n’être que visiteurs, nous serons aussi les témoins privilégiés de la vie d’hommes et de femmes de cet endroit âpre du monde. Mais nous n’en n’avons pas encore terminé avec ce premier jour à Njagabaar. Alors que nous laissons les enfants de Diadiam3 à leur vaisselle , nous entendons des hommes scander des chants plus ou moins guerriers.
Ce sont des lutteurs sénégalais d’un village voisin, venus s’entrainer tout près de Didiam3. Nous allons assister à un véritable ballet, des duels dans le sable sous le soleil couchant. Ce sont des professionnels et fiers de l’être, un brin mégalo d’ailleurs, que nous découvrons dans une grande clairière au milieu des acacias. Ils rêvent tous de devenir l’égal de Yakhya Diop Yékini, lutteur sénégalais indépendant, qui gagne des sommes astronomiques et remplit des stades de foot à chacun de ses combats. Nous n’avons jamais pu assister à une compétition officielle, mais le spectacle auquel il nous ont permis d’assister, à quelques mètres sur ce petit banc de sable perdu dans le Djoudj restera dans nos mémoires.

 



 



 



 



 





 

 

 



 



 


 



 



 



Cette première prise de contact avec le Djoudj et Njagabaar s'achève, déjà riche en émotions diverses et variées, en contacts humains forts et assez bouleversants. Nous allons rejoindre Cheikh, lui raconter, lui demander tant de choses que nous voulons comprendre, peut être à tord d'ailleurs,en nous rassasiant d'un bon repas que Nilan la cuisinière de Njagabaar nous a préparé.
Aller vite dormir, mais l'excitation du lendemain laisse l'imagination prendre le pouvoir car nous allons au parc du Djoudj à la rencontre du petit paradis des oiseaux et les images
de milliers de becs et de plumes trottent déjà dans la tête.

Pas très longtemps, La fatigue aura vite raison de nous malgré la moiteur infernale de la case ou l'on n'ose bouger un petit doigt de peur de transpirer; ensuite le corps s'habitue à cette chaleur et finalement s'adapte tout au long de la nuit réparatrice; bercés par les appels enfiévrés des rainettes jaunes, nous nous endormons dans la nuit africaine que notre case passoire tente de filtrer avec autant d'efficacité que la chaleur du jour passé....